appliquions à rabaisser Hugo au profit de M. Leconte de Lisle ? Les grands poètes veulent être admirés séparément, et chacun d’une admiration souveraine. « À Pégase donné, disait Hugo lui-même, je ne regarde point la bride. »[1] Qui s’inquiète trop des lacunes, c’est qu’il ne sent point assez le génie. « Pour moi, dit M. Weiss parlant de Polyeucte, quand je lis de tels vers je ne sais que m’écrier : Hosannah ! Hosannah ! » Serait-ce qu’il ignore que Racine a des dons à un degré éminent, dont Corneille est tout à fait dépourvu ? Non pas : mais il l’oublie ; et je l’estimerais moins s’il s’en souvenait.
Comme, au reste, il serait aisé de quereller sur ces querelles, de chicaner sur ces chicanes ! Quoi ! M. Leconte de Lisle ne serait que le plus laborieux et le plus martelé des versificateurs ? Mais il a écrit les vers les plus rapides, les plus ailés, les plus divins du monde :
À travers le ciel pur des nuits silencieuses,
Sur les ailes du rêve il revenait vainqueur…[2]
Et moi aussi, quand je lis de tels vers, je ne sais que m’écrier : Hosannah ! — Et M. Leconte