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TERTULLIEN.


de m’y souiller ? — Les lieux ne sont point interdits en eux-mêmes : un serviteur de Dieu peut aller sans péril non-seulement aux endroits où l’on s’assemble pour ces représentations, mais encore aux temples païens, pourvu qu’il ait une raison légitime, indépendante des fonctions ou des propriétés de ce lieu. D’ailleurs, les rues, les places publiques, les bains, les hôtelleries, nos maisons même, ne sont-elles pas peuplées d’idoles ? Satan et ses anges ont rempli le monde. Mais, pour demeurer encore dans le monde, nous n’avons point perdu Dieu : on le perd en participant aux crimes du monde. Pontife, ou simple adorateur, je monte au Capitole, ou bien au temple du dieu Sérapis ; c’est alors que je perds Dieu, de même que si je vais au Cirque ou au théâtre pour en contempler les spectacles. La souillure ne vient pas des lieux proprement dits ; elle vient de ce qui se passe dans ces lieux, de ce qui souille les lieux mêmes, ainsi que je l’ai démontré : la corruption communique la corruption. Nous rappelons à quelles divinités sont consacrés ces lieux, afin de mieux établir que tout ce qui s’y fait appartient spécialement aux divinités qui y président.

IX. Maintenant, un mot sur la manière dont se représentent les jeux du Cirque. L’usage des chevaux, simple autrefois et commun à tous, n’avait rien de coupable ; mais depuis qu’il a été appliqué à la célébration des jeux, le présent de la divinité est devenu l’instrument des démons. Aussi fait-on honneur de cette invention nouvelle à Castor et à Pollux : Mercure, ainsi que nous l’apprend Stésichore, leur donna des chevaux à cet effet. À leur suite arrive un Neptune, équestre selon les Romains, hippios selon les Grecs. Le char à quatre chevaux est consacré au Soleil ; le char à deux chevaux est consacré à la Lune. Mais,

Érichthonius le premier, par un effort sublime,
Osa plier au joug quatre coursiers fougueux,
Et, porté sur un char, s’élancer avec eux.

Or, Érichthonius, fruit hideux de la Terre, qui reçut les