Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 3.djvu/202

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puisque celui-ci n’a pas de Fils ; il anéantit le Fils, puisque le Fils n’a pas de Père. Car du moment qu’il est Père, il ne pourra être Fils. Les voilà ces rigides partisans de la monarchie qui ne savent pas même garder le Père et le Fils. Mais rien n’est difficile à Dieu. La chose est incontestable. « Ce qui est impossible au monde est possible à Dieu, » qui l’ignore ? « Dieu a choisi ce qui est insensé selon le monde pour confondre la sagesse. » Nous avons lu tous ces oracles. Par conséquent, disent-ils, il n’a pas été difficile à Dieu de se faire tout à la fois et le Père et le Fils, contrairement aux exemples qui régissent les choses humaines ; Dieu n’a-t-il pas renversé les lois de la nature, quand la Vierge et la femme stérile ont enfanté ? Que rien ne soit difficile à Dieu, je vous l’accorde ; mais si nous voulons étendre ce principe à tous les caprices de noire imagination, nous pourrons donc supposer que Dieu a fait tout ce qu’il nous plaira d’imaginer, parce qu’il l’aurait pu faire. Mais ce n’est point parce qu’il peut tout, que nous devons croire qu’il ait fait, même ce qu’il n’a point fait. Il s’agit de chercher s’il l’a fait. Il aurait pu, je l’avoue volontiers, donner à l’homme des ailes pour voler, comme il en a donné aux milans ; mais parce qu’il l’aurait pu, l’a-t-il fait ? Il aurait pu encore étouffer à leur naissance Praxéas et tous les autres hérétiques. Mais parce qu’il l’aurait pu, les a-t-il étouffés ? Non, il « fallait qu’il y eût » des milans et « des hérétiques : » il fallait que le Père aussi fût crucifié. C’est dans ce sens qu’il y aura quelque chose de difficile à Dieu, c’est-à-dire ce qu’il n’a point fait, non pas que la chose lui eût été difficile, mais parce qu’il ne l’a pas voulu. En effet, le pouvoir de Dieu, c’est sa volonté ; ce qu’il ne peut pas, c’est ce qu’il ne veut pas. Tout ce qu’il a voulu, il le peut, et il le montre. Conséquemment, comme il a pu devenir à soi-même son propre Fils, s’il l’a voulu, et comme il l’a pu, s’il l’a fait, avoir prouvé qu’il l’a fait, se sera prouver qu’il l’a pu et l’a voulu.