Page:Theuriet - Bigarreau, 1886.djvu/215

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Il se sentait moins à l’aise et se demandait, non sans inquiétude, comment Marie-Ange Jutel accueillerait cette visiteuse inattendue.

En effet, quand la voiture tourna dans la cour herbeuse du manoir, et qu’au bruit des roues, Marie-Ange accourut sur le perron, le méfiant et noir regard qu’elle jeta sur l’étrangère n’était nullement encourageant. Ses lèvres avaient soudain pâli, ses sourcils s’étaient froncés, et sournoisement, silencieusement, sans plus bouger qu’une statue, elle dévisageait cette belle fille brune, dont les éclats de rire tapageurs et l’étrange toilette ne lui disaient rien de bon. Devant cette attitude hostile, Jean Trémereuc comprit qu’il fallait parler en maître. D’une voix brève, il ordonna de préparer la meilleure chambre pour Mme Rey, — une amie à lui, qui passerait plusieurs jours à Morgrève. — En entendant formuler cet ordre avec un accent impératif, Marie-Ange tressaillit, et, baissant la tête, de l’air navré d’un chien battu, disparut dans les profondeurs du vestibule.

Pascaline Rey sauta à terre, défripa ses jupes, et, en attendant qu’on préparât l’appartement mis à sa disposition, consentit à faire un tour de