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Page:Theuriet - Gertrude et Véronique, 1888, 4e mille.djvu/142

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réveilla, il faisait nuit et la tranquillité de la rue indiquait une heure avancée. Une veilleuse éclairait la chambre, et dans un grand fauteuil mademoiselle Célénie, tout habillée, sommeillait bruyamment. Gertrude passa les mains sur son front, se rappela la scène de la matinée et se sentit prise d’un nouvel accès de désespoir.— Elle, si pure et si fière de sa pureté, se trouvait soupçonnée d’une faute dont la seul pensée la faisait frémir d’indignation ; les demoiselles Pêche la croyaient coupable et tout l’atelier sans doute partageait cette conviction… Et demain son nom— le nom de Mauprié ! — courrait la ville escorté de bruits calomnieux, et cette rumeur honteuse parviendrait jusqu’à Xavier !… A cette idée son cœur fut déchiré et elle se remit à pleurer… Certes, Xavier avait l’esprit trop élevé et trop de confiance en elle pour croire aussi facilement une calomnie ; mais il était jaloux et soupçonneux… Un doute pouvait se glisser dans son esprit, un doute n’était-ce pas déjà trop ?… Rien qu’en y songeant, Gertrude sentait toute sa fierté se soulever… Elle se disait qu’un soupçon de la part de Xavier suffirait pour creuser entre eux un abîme, — et elle pleurait sur son amour, sur son seul bonheur cruellement menacé…