Page:Thevet - La France antarctique - Gaffarel, 1878.djvu/131

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aussi sont les hommes qu’il nourrit. Delà les hommes sont fort noirs, de grade stature, le corps alaigre et deliure, nonobstant le païs verdoye, plein de beaux arbres portans fruit. Deça vous verrez tout le contraire, les hômes de couleur cendrée, et de plus petite stature. Quant au peuple de ce païs de Senegua, ie n’en puis dire autre chose, que de ceux du cap Verd, sinon qu’ils font encore pis. La cause est que les Chrestiens n’oseroyent si aysément descendre en terre pour traffiquer, ou auoir refraischement comme aux autres endroits, s’ils ne veulent estre tuez ou pris esclaues. Toutes choses sont viles et contemptibles entre eux, sinon la paix qu’ils ont en quelque recommandation les uns entre les autres. Le repos pareillement, auec toutesfois quelque exercice à labourer la terre, pour semer du ris : car de blé, ne de vin, il n’y en a point. Quant au blé, il n’y peut venir, comme en autres païs de Barbarie ou d’Afrique, pour ce qu’ils ont peu souuent de la pluie, qui est cause que les semences ne peuuent faire germe, pour l’excessiue chaleur et siccité. Incontinent qu’ilz voyent leur terre trempée ou autrement arrousée, se mettent à labourer, et apres auoir semé, en trois mois le fruit est meur, prest à estre moissonné. Leur boisson est de ius de palmiers et d’eau. Arbre fructifere, et huille de grâde proprieté. Entre les arbres de ce païs, il s’en trouue un de la grosseur de noz arbres à glan, lequel apporte un fruit gros comme dattes. Du noyau ils font huile, qui a de merueilleuses proprietes. La premiere est, qu’elle tiêt l’eau en couleur iaune comme saffran : pourtant ils en teignent les petis vaisseaux à boire, aussi quelques chapeaux faits de paile de ionc,