Page:Thevet - La France antarctique - Gaffarel, 1878.djvu/329

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bruuage boiuent par l’espace de quinze ou vingt iours consecutiuement, faisans quelque petite diete : ce que succede fort bien ainsi que i’ay peu entêdre. Et ladite escorce n’est seulement propre à ladite affection, mais à toutes maladies froides et pituiteuses, pour attenuer et deseicher les humeurs : de laquelle pareillement usent noz Ameriques en leurs maladies. Et encore telle decoction est fort plaisante à boire en pleine santé. Excellence du fruit de cest arbre Hyuourahé. Autre chose singuliere à cest arbre portât un fruit de la grosseur d’une prune moyenne de ce païs, iaune comme fin or de ducat : et au dedans se trouue un petit noyau, fort suaue et delicat, auec ce qu’il est merueilleusement propre aux malades et dégoustez. Mais autre chose sera par auanture estrâge, et presque incroyable, à ceux qui ne l’auront veiie : c’est qu’il ne porte son fruit que de quinze ans en quinze ans. Aucuns m’ont voulu donner à entêdre de vingt en vingt : toutesfois depuis i’ai sceu le contraire pour m’en estre suffisammêt informé, mesmes des plus anciens du païs. Ie m’en fis montrer un, et me dist celuy qui me le monstroit, que de sa vie n’en auoit peu manger fruit que trois ou quatre fois. Lothe homerique. Il me souuiêt de ce bon fruit de l’arbre nommé Lothe, duquel le fruit est si triant, ainsi que recite Homere en son Odyssée, lequel apres que les gens de Scipion[1] eurent gousté, ils ne tenoyent conte de retourner à leurs nauires, pour manger autres viandes et fruits. Au surplus en ce païs se trouuent quelques arbres portans casse, mais elle n’est si excellente que celle d’Egypte ou Arabie.

  1. Pline. H. N. xiii. 32. — xxii. 27.