Page:Thibaudet – Histoire de la littérature française.pdf/337

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

IV
LES ÉPIGONES
Les Parnassiens.
Une vingtaine d’années après les Tétrarques naît la volée de leurs disciples, à la date moyenne de 1840, soit Léon Dierx en 1838, Sully-Prudhomme en 1839, Hérédia et Coppée en 1842, Catulle Mendès en 1843, Anatole France en 1844. Ils débutent à la fin de l’Empire. Ce sont les Parnassiens proprement dits.

Ils trouvèrent en effet ce nom, ou plutôt les petits journaux leur trouvèrent ce nom, parce que le recueil collectif de vers que publia en 1866 le libraire Lemerre, qui débutait comme éditeur de jeunes poètes s’appelait le Parnasse contemporain. On était parnassien d’ailleurs à très bon compte ; il suffisait de rimer correctement et de se déclarer contre la facilité, la sentimentalité, la banalité. C’est-à-dire contre des substantifs et contre de mauvaises habitudes, mais non contre des personnes. Ces jeunes poètes étaient extrêmement respectueux, de mise et d’habitudes correctes, généralement employés de bureau : ils demandèrent, pour leur premier recueil, des vers à Auguste Barbier lui-même. Vénérant M. de Lamartine, ils en étaient réduits à se chercher des adversaires parmi ses disciples de province et les Muses de département. Des poètes de la génération romantique, les Parnassiens ne déclassent guère que Béranger. Hugo reste le dieu et ce sont les Parnassiens eux-mêmes qui constituent leurs prédécesseurs en tétrarchie pour leur apporter l’hommage.

Ils sont de grands disciples. Ils n’introduisent aucune fulguration, aucun frisson nouveau. Il serait regrettable qu’ils n’eussent pas existé, mais s’ils manquaient il ne manquerait