des prix. Et l’on n’obtient de prix sérieux qu’en écrivant des romans. Tout le monde, dans la génération de 1914, a été bon pour écrire un roman, de même que tout le monde était bon pour faire un soldat.
Les critiques méfiants n’ont pas manqué de remarquer que, pareillement, tout le monde au XVIIIe siècle était bon pour faire une tragédie, et que cela signifiait précisément la mort de la tragédie. Mais l’analogie ne s’impose pas. La tragédie était un gaufrier, faisait suite aux vers latins, et répondait dans l’ordre scolaire à une rhétorique supérieure : chaque rhétoricien avait sa tragédie dans ses livres de classe. C’est au contraire dans sa vie même que chaque homme d’aujourd’hui est susceptible d’avoir son roman. La transcription d’une expérience vivante en roman peut donner autant de romans vivants qu’il y a d’expériences transcrites. Limite théorique, bien entendu, mais en deçà de laquelle il y a place pour beaucoup d’êtres vivants et vrais, au contraire des ombres cimmériennes de tragédie.
Dans le roman comme dans la poésie de cette génération, il faut distinguer, en même temps que les valeurs qu’elle déclasse, l’apport de ceux de ses aînés que nous avons appelés les territoriaux de 1914, et son apport propre, à elle.