n’y a pas songé ou si, l’ayant vu, il a préféré passer sous silence un précédent impopulaire. La liberté des cultes étant reconnue par la Charte, une loi confère cependant au dogme essentiel de l’Église catholique, à la présence réelle de Jésus-Christ dans l’Eucharistie une reconnaissance officielle et une protection spéciale, puisqu’elle prononce contre la profanation publique d’une hostie la peine de mort. — Cette loi de privilège a, tout à fait dans le sens de M. Maurras, une portée politique plus que religieuse : elle est votée moins pour le vrai que pour le bien par une majorité de députés et de pairs où les voltairiens et les athées sont nombreux. Elle signifie pour l’Église catholique ce qu’en Angleterre signifient contre elle et pour l’Église anglicane le bill du test et l’obligation pour tout fonctionnaire de répudier par écrit ce même dogme de la présence réelle. — Enfin elle est agencée très adroitement de façon à demeurer plus spirituelle que temporelle, plus décorative qu’efficace. Les cinq ans qu’elle dura, elle ne fut jamais appliquée. Faisant bloc avec la loi sur le milliard des émigrés, elle donnait à l’Église une satisfaction idéale en même temps que la noblesse spoliée recevait une compensation réelle. À l’égard de ces deux corps, la monarchie réparait les catastrophes du passé. Elle les réparait avec le moins de frais pour le reste de la nation, puisque la loi du sacrilège devait demeurer inopérante dans l’arche sainte, et que la loi du milliard, provoquant une plus-value des biens nationaux désormais en sûreté, profitait à tout le monde. Ce milliard des émigrés, multiplié par la loi au bénéfice de chacun, fait même un pendant fort élégant au milliard des congrégations anéanti par la loi au détriment de tout le monde.
Malheureusement pour la Restauration, pour l’Église et pour la France, Villèle ne réussit pas. Le résultat de la loi du sacrilège fut que, cinq ans après, les prêtres, pendant une année, ne purent sortir à Paris en costume ecclésiastique sans être insultés et maltraités. Au contraire, de 1830 à 1848, la campagne du parti catholique sur le terrain de la liberté et du droit commun fut couronnée par des succès définis et considérables, par la loi Falloux et par les avantages de toutes sortes que conserva l’Église pendant toute la durée du second Empire. Il est dès lors naturel que le clergé, ému du zèle déployé par M. Maurras, lui dise à l’oreille : Surtout ne nous protégez pas ! — et que depuis 1830 le trône et l’autel, même dans leurs rapprochements passagers, se soient tenus prêts toujours à couper la corde, comme Tartarin et Bompard au Mont-Blanc.