faudrait faire pour que tout cessât d’aller mal. Mais avoir des moyens pour détruire ne signifie pas du tout que l’on a des plans pour remplacer. Ainsi la marine, par les qualités de continuité et de vigilance qu’elle exige particulièrement dans ses services directeurs, fournit un excellent microcosme de l’État, la ville de bois dont parlait la Pythie fait figure de cité complète. La marine, comme toutes les choses humaines comporte des abus, des lacunes et des vices. Il appartient à une critique clairvoyante de les signaler, et c’est en particulier la tâche d’un bon rapporteur parlementaire. Certain rapport sur la marine, d’Etienne Lamy, est réputé dans le monde politique comme un modèle du genre. Lamy, en 1885, relevait d’une Assemblée, d’un milieu et d’une éducation qui ne pouvaient lui suggérer l’idée de poser, par l’excellence de son rapport, sa candidature au ministère de la marine. Pressenti, il se fût récusé. Savoir reconnaître que des vers sont mauvais ne signifie pas du tout qu’on saura en composer de bons. Mais quand Lamy eût été remplacé comme député par Trouillot et comme critique de la marine par Lockroy, les choses changèrent. Après quelques rapports budgétaires, Lockroy s’assit devant le bureau de Colbert, qui échut plus tard de la même manière à Pelletan. Le nom, la vie politique et les ministères de M. Clemenceau symboliseraient à la perfection ce passage automatique de la fonction critique à la fonction organique.
Si le régime parlementaire nous convient mal, si ce vêtement de confection nous habille lourdement, c’est, pense M. Maurras, qu’il n’est pas français. « Le parlementarisme, dit-il, est une institution née anglaise et restée anglaise en dépit des transformations : c’est le gouvernement des Chambres ou plutôt d’une Chambre[1]. » Et il écrit ailleurs : « Non, la démocratie, le libéralisme, l’esprit de la République, de la Révolution et de la Réforme n’ont rien de latin. Tout cela tire, en fait, son origine des forêts de la Germanie[2]. » C’est pourtant à Athènes que tout dépendant du peuple le peuple dépendait de la parole ; c’est à Athènes qu’Aristophane dénonce la souveraineté de la Langue comme M. Maurras dans l’Avenir de l’Intelligence a dénoncé en France la souveraineté de cette Langue omnipotente qui s’appelle l’Écrit. La puissance de l’éloquence est au moins aussi grande dans les pays latins que dans les pays anglo-saxons, et l’amour de l’argute loqui