vèrent même comme la guerre de Cent ans nous avait vus, avec un roi fou. La royauté anglaise fut donc aussi peu anglaise que la royauté française était française. De là l’obligation pour le Parlement de parer aux défaillances du pouvoir. Il en était d’autant plus capable que, formé sur une charpente d’aristocratie, il comportait comme la monarchie l’hérédité, et mieux que la monarchie la nationalité. L’aristocratie, toute anglaise, admettait pour rois le Hollandais Guillaume ou l’Allemand Georges, ainsi que la monarchie française admettait des ministres italiens comme Mazarin et des maréchaux allemands, comme Maurice de Saxe. L’histoire n’avait pas fait porter chez l’un et l’autre peuple l’accent national sur le même élément.
Le développement du régime parlementaire en Angleterre et en France nous permettrait de définir le Parlement comme une représentation d’intérêts qui, dans la carence du pouvoir monarchique, s’est trouvée investie d’attributions sans cesse plus étendues. Quand ce pouvoir, en Angleterre, est tombé en défaillance ou en sommeil, le Parlement l’a redressé ou suppléé en le conservant. En France le Parlement a pris, après les longs détours de l’histoire, la succession de la monarchie absolue ; mais son principe paraît celui du vieux droit romain, la délégation du pouvoir par le peuple. Le peuple délègue le pouvoir qu’il a, c’est-à-dire le pouvoir dans sa plénitude. Au contraire dans les pays à gouvernement héréditaire le peuple ne délègue qu’un pouvoir limité par l’institution monarchique. Aux États-Unis, dans un Nouveau-Monde qui n’a pas été touché par le droit romain, il délègue un pouvoir divisé, des pouvoirs séparés, — système que les constitutions de 1791 et de 1848 n’ont pu acclimater en pays latin.
L’état normal, sain, de l’Europe contemporaine, c’est le régime de la monarchie parlementaire, qui laisse évidemment à désirer du point de vue monarchique et du point de vue parlementaire, mais qui présente de bons gages de conservation et d’adaptation. L’exemple de la Norvège serait médité utilement par les nouvelles républiques européennes. Les deux grands hommes politiques du XIXe siècle, Cavour et Bismarck, n’ont pas hésité à lier l’un le Statuto à la dynastie nationale de Savoie, l’autre le suffrage universel à l’unité allemande. Une monarchie anti-parlementaire, telle que la veut M. Maurras, n’aurait de précédents que celui du Second Empire et de la Constitution de 1852 (qui avait d’ailleurs de fort bonnes parties). Comme l’écrivait Lionel des Rieux dans l’Enquête, le lys de M. Maurras butine sur l’abeille. — M. Maurras lui répond que, pour être « aussi peu parlementaire