plexe, cultiver la sensation de l’inquiétude et de manière à s’endurcir contre cette épreuve, c’est la préface nécessaire de tout mouvement méthodique de la raison.
« Célérité à s’entr’ouvrir, constance et fermeté dans la suite de cet effort, c’est ce qui permet à nos sens et à notre esprit d’accueillir les hôtes nombreux et bourdonnants, chargés de biens mystérieux, sans lesquels nous végéterions dans l’ignorance, l’inertie et la fatuité…
« Le tort essentiel du principe de liberté, c’est de prétendre suffire à tout et de tout dominer. Il se donne pour l’alpha et l’oméga. Or il n’est que l’alpha. Il est simple commencement…
« Que vont devenir tant de biens ? À moins de vous borner à les mettre sous vitre à la façon du collectionneur, ou d’en jouer en sceptiques ou en dilettantes, vous allez en user, vous allez les traiter, vous allez essayer d’en tirer quelque chose. Quoi ? ni la curiosité ni la tolérance ne vous l’apprendront… Pour agir maintenant il faut choisir, il faut classer. Toute la vie est dans ce problème d’organisation…
« Certes, par désespoir de trouver la solution satisfaisante ou la hiérarchie supportable, on peut se résigner au modus vivendi qui juxtapose les contraires et conclut la plus médiocre des trêves entre droits équivalents et forces irréductibles. Un esprit énergique ne trouve là qu’une sensation de défaite… Il faut sortir de cet état de liberté comme on sort d’une prison. Il faut adopter un principe et s’en tenir à lui. Ce n’est pas (comme le croit M. Seippel) pour anéantir toutes les idées différentes, c’est pour les composer autour de leur centre normal, pour les ranger et les graduer, au-dessous de lui, aussi nombreuses, aussi vivantes que possible, de manière à ne rien laisser d’inemployé, et pour utiliser plus ou moins toute chose[1]. »
Ainsi pour M. Maurras l’acte décisif et vital de l’esprit c’est le choix. Renouvier a fondé sur une vue analogue toute l’Esquisse. Mais, pour ce philosophe de la liberté, le choix est l’acte par lequel s’affirme la liberté. Pour M. Maurras, qui parle en comtiste orthodoxe et en catholique honoraire, le choix est l’acte par lequel on sort de la liberté pour être déterminé par un ordre et se soumettre aux conditions de l’action. Il semblerait qu’il n’y ait là qu’une dispute de mots. En réalité il y a autre chose, — la question profonde de savoir à qui appartient en nous non l’antériorité chronologique impossible à trouver, mais le primat de qualité et de valeur, ou à l’homme individu
- ↑ Quand les Français ne s’aimaient pas.