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Page:Thiers Adolphe - Histoire de la Révolution française t1 (1839).pdf/54

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RÉVOLUTION FRANÇAISE.

tiers n’aurait qu’une seule voix contre les deux voix de la noblesse et du clergé.

La première question agitée fut celle du nombre des députés. Jamais controverse philosophique du dix-huitième siècle n’avait excité une pareille agitation. Les esprits s’échauffèrent par l’importance tout actuelle de la question. Un écrivain concis, énergique, amer, prit dans cette discussion la place que les grands génies du siècle avaient occupée dans les discussions philosophiques. L’abbé Sièyes, dans un livre qui donna une forte impulsion à l’esprit public, se demanda : Qu’est le tiers-état ? Et il répondit : Rien. — Que doit-il être ? — Tout.

Les états du Dauphine se réunirent malgré la cour. Les deux premiers ordres, plus adroits et plus populaires dans cette contrée que partout ailleurs, décidèrent que la représentation du tiers serait égale à celle de la noblesse et du clergé. Le parlement de Paris, entrevoyant déjà la conséquence de ses provocations imprudentes, vit bien que le tiers-état n’allait pas arriver en auxiliaire, mais en maître, et en enregistrant l’édit de convocation, il enjoignit pour clause expresse le maintien des formes de 1614, qui annulaient tout à fait le rôle du troisième ordre. Déjà dépopularisé par les difficultés qu’il avait opposées à l’édit qui rendait l’état civil aux protestans, il fut en ce jour complètement dévoilé, et la cour entièrement vengée. Le premier,