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Page:Thomassy - Essai sur les ecrits politiques de Christine de Pisan.djvu/10

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rons de la considérer sous un autre point de vue, et de nous familiariser d’abord avec son caractère et son génie. Il importera surtout de prouver qu’au fond on est encore loin de la connaître. Établir ce fait sera déblayer le terrain, et préparer la place où les amis des études historiques pourront lui élever un monument digne de sa renommée[1].

  1. La valeur des ouvrages de Christine de Pisan et l’intérêt que les sciences historiques trouveraient à leur publication, sont justifiés par les éloges que cette femme célèbre a reçus des écrivains du moyen âge. Mais comme il serait trop long de rappeler ici tout ce qu’ils ont dit à sa louange, il nous suffira d’un seul témoignage plus moderne, et surtout plus compétent ; car il appartient à l’un de nos meilleurs critiques, au fameux bibliographe Gabriel Naudé. C’est la promesse faite par cet écrivain judicieux de publier, parmi les ouvrages de Christine, le Livre de la Paix et le Trésor de la Cité des Dames, destinés à l’instruction d’un prince et d’une princesse qui devaient monter sur le trône de France. Cette promesse inaccomplie se trouve dans une lettre adressée, en 1636, à Thomasini, éditeur des œuvres de Cassandre Fidèle, de cette autre femme illustre qui fut, comme Christine, et un siècle après elle, un véritable prodige dans le monde savant de son époque. Cassandre qui, dès sa jeunesse, avait égalé en renommée le fameux Pic de la Mirandole, le plus beau et le plus savant des hommes, sut embellir par ses grâces les études les plus sérieuses, et ennoblir tous les talens par ses vertus. Elle soutint des thèses avec éclat, et donna dans Padoue des leçons publiques. Sollicitée par Isabelle-la-Catholique de venir se fixer à sa cour, elle fut retenue par la république de Venise, jalouse de conserver en elle le plus beau fleuron de sa