Aller au contenu

Page:Thucydide - Œuvres complètes, traduction Buchon, pp001-418, 1850.djvu/126

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Athéniens eux-mêmes perdirent environ cent vingt hoplites. Tel fut le nombre des hommes qu’ils eurent à regretter, et tous étaient dans la fleur de l’âge. Ce furent d’excellens guerriers que la république perdit dans cette affaire. L’un des deux généraux, Proclès, fut tué. les vaincus traitèrent avec les Étoliens pour enlever leurs morts : ils retournèrent à Naupacte, et regagnèrent ensuite Athènes sur leurs vaisseaux. Démosthène se tint à Naupacte. ou du moins il n’abandonna pas le pays. Après ce qui était arrivé, il craignait les Athéniens.

XCIX. Vers le même temps, les Athéniens qui tenaient la mer autour de la Sicile cinglèrent vers la Locride, firent une descente, et vainquirent les Locriens qui vinrent contre eux au secours. Ils prirent Péripolium, place bâtie sur le fleuve Alex.

C. Le même été, les Étoliens qui avaient déjà envoyé en députation, à Corinthe et à Lacédémone, Tolophus d’Ophionée, Boriade d’Euryte et Tisandre d’Apodotie, obtinrent une armée contre Naupacte, où l’on avait appelé et reçu les Athéniens. Ce fut vers l’automne que les Lacédémoniens leur firent passer trois mille hoplites de leurs alliés. Il y en avait cinq cents d’Héraclée, cette ville de la Thrachinie, alors fondée depuis peu. Euryloque de Sparte eut le commandement de ces troupes ; il était accompagné de Macarius et de Menédée, aussi de Sparte.

CI. L’armée étant rassemblée à Delphes, Euryloque envoya un héraut aux Locriens-Ozoles. Il fallait passer par leur pays pour aller à Naupacte, et d’ailleurs il voulait les détacher des Athéniens. Les gens d’Amphise, qui étaient Locriens, le servirent avec beaucoup de zèle dans cette négociation, par la crainte que leur inspirait la haine des Phocéens, ils furent les premiers à donner des otages, ils engagèrent les autres à suivre leur exemple, et ils réussirent, parce qu’on craignait l’approche de l’armée. Ils gagnèrent d’abord les Myonées qui sont leurs voisins, et c’est de leur côté que l’accès de la Locride est le plus difficile ; ensuite les Ipnées, les Messapiens, les Tritées, les Challæens, les Tolophoniens, les Hessiens, les Œanthées. Tous prirent les armes. Les Olpéens donnèrent des otages ; mais ils ne suivirent pas l’armée : les Hyæens n’en donnèrent qu’après qu’on eut pris leur bourgade nommée Polis.

CII. Tout était prêt : Euryloque déposa les otages à Cytinium dans la Doride, et conduisit son armée vers Naupacte, à travers le pays des Locriens. Dans sa route, il prit Onéon qui leur appartenait, et s’empara aussi d’Eupolium ; les habitans de ces deux places avaient refusé de se joindre à lui. Arrivé dans la campagne de Naupacte, et ayant déjà les Locriens avec lui, il saccagea le pays et prit le faubourg qui n’est pas muré. Il passa à Molicrion, colonie de Corinthe, mais sujette des Athéniens, et il la prit. Démosthène, qui restait toujours aux environs de Naupacte depuis sa malheureuse expédition d’Étolie, avait pressenti l’arrivée de cette armée, et craignant pour la place, il alla demander l’assistance des Acarnanes. Ils conservaient encore du ressentiment de ce qu’il s’était retiré de devant Leucade, et ce ne fut pas sans peine qu’ils se laissèrent persuader. Ils envoyèrent par mer mille hoplites qui entrèrent dans la place pour la soutenir. Sans ce renfort, comne on avait une grande étendue de fortifications et peu de monde pour les défendre, il était à craindre qu’on ne pût résister. Euryloque et son monde, voyant qu’une armée était entrée dans la place et qu’on ne devait plus espérer de la forcer, se retirèrent, non dans le Péloponnèse, mais dans l’Æolide, qu’on nomme aujourd’hui Calydon, à Pleuron et dans d’autres endroits de cette contrée, et à Proschium qui dépend de l’Étolie. Les Ambraciotes les vinrent trouver et leur persuadèrent d’attaquer avec eux Argos d’Amphiloquie, l’Amphiloquie entière, et même encore l’Acarnanie. Si l’on s’en rendait maître, ils assuraient que toute l’Épire entrerait dans l’alliance de Lacédémone. Euryloque les crut ; il renvoya les Étoliens et s’arrêta dans le pays avec son armée, jusqu’à ce qu’il fût temps de se joindre aux Ambraciotes qui étaient partis pour former le siège d’Argos ; et l’été finit.

CIII. L’hiver suivant[1], les Athéniens qui étaient en Sicile, leurs alliés grecs et ceux des Sicules qu’opprimait le gouvernement de Syracuse, et qui avaient abandonné l’alliance de cette ville pour embrasser celle d’Athènes, firent, de concert, l’attaque de Nessa, place de Sicile dont les Syracusains occupaient la citadelle. Ils ne purent s’en rendre maîtres et se retirèrent ;

  1. Après le 7 octobre.