Aller au contenu

Page:Tinayre - Avant l amour.pdf/221

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
208
avant l’amour

On ne respire pas impunément un air pernicieux. Maxime avait fait ce perfide calcul de m’abandonner à moi-même en multipliant les suggestions et les ivresses qui me jetteraient, vaincue, dans ses bras. Il sauvait ainsi sa responsabilité, oubliant que ses étranges conseils aidaient puissamment ceux de la nature. Et peu à peu, de baisers en baisers, notre liaison dévia, changeant de caractère, à mesure que s’abolissaient ma confiance et le respect de mon amant. Proclamant le droit au plaisir, raillant les préjugés dont la pudeur se fortifie, Maxime n’était ni assez pur, ni assez noble, pour me chérir sans me dépraver. Ses leçons portaient leurs fruits, et une terreur me prenait quand je me sentais devenir pareille à lui, inconsciente, orgueilleuse et cynique. Certes il m’avait aimée autrement sous les saules des Yvelines, au bord du ruisseau, dans les bois d’automne violacés par le soir. Il avait subi l’inévitable crise sentimentale ; mais l’irritante volupté de la lutte et de la conquête, l’incertitude de la possession, tout ce que les caresses