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Page:Tinayre - L Amour qui pleure.djvu/122

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d’instinct, tellement compréhensive, et charmante, belle, mieux que belle !… Ah ! oui, nous étions heureux !…

Il soupira…

— Moi aussi, reprit-il, quand je l’ai perdue, j’ai été assommé par le coup… J’ai voulu mourir… Les camarades m’ont gardé, veillé, tu te rappelles ?… Fichu service qu’ils m’ont rendu là. Et ils ont voulu me distraire, me consoler… Ah ! pour le coup, j’ai flanqué tout le monde dehors… Et puis, dans l’atelier, tout seul, j’ai pensé… Je me suis cherché des raisons, des droits de vivre… Et j’ai trouvé ça : mon art… Travailler, avec ma douleur, comme avec une bonne compagne, la regarder en face, bravement, et l’aimer, parce que ma douleur c’est encore mon amour… Oh ! non, non, je ne voulais pas être consolé !… Moins souffrir, oublier, sourire un jour avec les autres hommes, trouver peut-être quelque douceur à des choses que n’embellit pas son souvenir, la tuer, enfin, une seconde fois ?… Non !… Et je me suis enfermé avec ma douleur : elle a été mon inspiratrice… J’ai sculpté des figures funéraires, des Pleureuses, toutes les images