Page:Tinayre - L Amour qui pleure.djvu/16

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trême horizon, où, dessinées d’un trait d’argent sur le ciel plus clair, brillent les crêtes des monts Dore.

Le hameau, tout proche, disparaît dans un pli du terrain ; mais on sent, éparse en l’air humide, cette odeur de vendange et de fumée qui est l’odeur même de l’automne.

Parfois une automobile, allant de Tulle à Clermont, se risque dans le chemin rocailleux. Des Parisiennes masquées et voilées s’arrêtent… « Voyez, disent-elles, l’adorable petit château !… Est-il à vendre ?… On aimerait cacher là un grand bonheur ou un grand chagrin… » Et elles songent… Quel hobereau, plus fier et plus pauvre que les d’Artagnan et les Sigognac, habite la vieille demeure, au bord de l’étang, au bout de la sombre charmille ? Quelle demoiselle noble et pieuse, quelle Eugénie de Guérin, oubliée par l’amour, languit doucement dans les chambres froides, dans les salons à rideaux jaunes, meublés d’acajou ronceux ?… Oh ! regarder par la fenêtre, un instant, surprendre un tic tac d’horloge, l’éclair d’une flambée, le geste de mains pâles sur un métier à tapisserie, — la poésie secrète de la province !…