Page:Tinayre - L Amour qui pleure.djvu/272

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

» — J’ai été trop heureux d’abord… puis trop malheureux… Maintenant, je refais le voyage que je fis naguère avec Élisabeth… Il me semble que je poursuis sa chère ombre, dans ce pays qui fut le sien et que j’aimai.

» Il me parla d’Elle, sans déclamation, sans violence du geste et de la voix, avec une douleur sourde et contenue.

Elle n’avait pas souffert. Elle était morte d’un subit arrêt du cœur, par un doux soir de lune et de brise. Assise au piano, elle jouait une sonate de Mozart, tandis que Franckel, à la fenêtre, respirait l’odeur de la fenaison récente… Sa jeune vie s’était éteinte dans la vibration d’un arpège mineur. Ses doigts de morte avaient tenu la dernière note, longtemps, trop longtemps… au delà de la mesure écrite… Puis, le silence éternel…

» — Pourtant, dit Franckel, j’ai pu lui survivre… Un espoir m’a soutenu… une quasi-certitude… Mais non !… tu rirais… tu me démontrerais, logiquement, scientifiquement, l’inanité de ma chimère… tu penserais : « Il est fou… »

» — Prends garde, dis-je, en montrant la