Page:Tinayre - La Douceur de vivre.djvu/116

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Capri, à droite, isolée sur la mer, semblait un bloc de cristal que traversait et colorait le bleu même de l’eau.

Jamais Marie Laubespin n’avait vu un bleu pareil à celui-là, ni dans le ciel, ni dans les rivières, ni dans les vitraux des églises, ni sur les pétales des fleurs les plus bleues. Ici, seulement, croyait-elle, la nature avait accompli le miracle de l’azur qui imprègne les eaux profondes, l’air mobile, et la matière même de ces décors volcaniques qui ont, suivant les heures, les nuances de l’ardoise, de l’améthyste, du jade ou du saphir, mais qui participent toujours, clairs ou sombres, à l’immense symphonie du bleu.

Marie demanda naïvement si les naturalistes ont dit vrai, et si c’est une algue minuscule qui teinte en indigo la mer Tyrrhénienne. Angelo fut indigné :

— Une algue ?… Peccato !… Qu’est-ce qu’ils disent, ces messieurs-là ?… La Tyrrhénienne est bleue parce qu’elle fut le miroir de Vénus et qu’elle garde le reflet de ses yeux bleus… Et c’est pourquoi les jeunes femmes qui la contemplent trop longtemps deviennent amoureuses.

Marie fronça le sourcil.

— Les femmes de chez vous, peut-être ?

— Oh ! non, dit Angelo, paisiblement, toutes,