Page:Tinayre - La Douceur de vivre.djvu/133

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

point jaloux… Le peuple napolitain est bienveillant à l’amour qui passe !

Marie ne soupçonnait pas que les regards et les sourires de tous ces gens la fiançaient à Angelo, mais le jeune homme devinait la méprise, et, nonchalamment subissait la suggestion amoureuse… Marie était à lui, un peu, puisqu’on la croyait à lui… Il tenait le rôle de l’amant ou du fiancé, et il prenait l’attitude, il imaginait, il ressentait presque les sentiments du personnage… Naguère, l’éclatante Isabelle l’avait fasciné. Il n’avait pas remarqué les grâces plus modestes de Marie. Mais le cœur d’Angelo suivait ses yeux, et ses yeux voyaient Marie, à toute heure !

— Quelle jolie femme ! murmurait Salvatore. Comme elle a parlé de mes pauvres statuettes ! Comme elle a été charmante pour Santaspina !… Regarde-la marcher !… C’est une nymphe du Nord, une petite reine de Thulé !… Je voudrais la modeler dans la cire !

Angelo répondait :

— Jolie, mais froide !

— Froide, Angè ?

— Comme la neige, froide « à faire tomber les dents ».

Ils avaient dépassé la station. Marie voulut marcher encore.