Page:Tinayre - La Douceur de vivre.djvu/168

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pas cet amour de la nature qui est indépendant du sens esthétique, et qui est si commun chez les Germains. Quand M. Wallers décrivait le charme d’une peinture, quand M. Weiss racontait la merveille d’une aurore, vue de l’Etna, M. Hoffbauer disait bien : « Ach !… colossal… colossal… » mais il discutait aussitôt tel ou tel détail de la fresque, citait des opinions, réfutait des arguments, construisait une hypothèse. Et l’on sentait que le moindre caillou étrusque, mycénien ou crétois, l’intéressait plus que l’aurore.

L’abbé Masini, fureteur, imaginatif, spirituel, était d’une autre race et d’une autre école. Il se rapprochait de Wallers, car il cherchait la vie dans l’art, et les hommes dans leurs œuvres. Peut-être sa documentation était un peu mince, ses hypothèses trop hardies, ses jugements trop rapides. Il avait une disposition dangereuse à embellir les choses qu’il aimait, et ses ouvrages, abondants, éloquents, passionnés, révélaient un artiste presque trop sensible pour devenir jamais un grand savant.

Les frères Barrington, deux jumeaux à figures rasées, vêtus de kaki, chaussés de guêtres jaunes, se ressemblaient exactement. Ils n’étaient pas archéologues : ils se disaient « esthètes ». William était peintre ; Edward était architecte.