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Page:Tinayre - La Douceur de vivre.djvu/322

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froide jeune femme, résignée à la solitude des veuves ; elle n’est plus la Marie des madones et des anges, la recluse volontaire qui travaillait et priait si bien « à la hauteur des oiseaux et des cloches », et gardait secrète en son âme la petite lampe d’une tendresse très pure… Un vent joyeux a soufflé du midi. Il n’a pas éteint la lampe, mais il en a fait un brasier terrible dont l’ardeur éblouit Marie… Tout brûle, à ce grand feu, elle vieil idéal n’est plus que cendre…

Marie se construira un autre idéal, avec l’amour de Claude et la facile sagesse pratique que ses amis napolitains lui ont enseignée. Elle essaiera de croire à leur Dieu indulgent et elle sera très heureuse… Naples l’a guérie de la maladie de l’absolu, de la manie métaphysicienne. Demain, elle signifiera à M. Wallers sa volonté de divorcer, d’épouser Claude… Le père se révoltera d’abord, puis il cédera ; mais la pauvre maman, pieuse, sera épouvantée… Il y aura des scènes pénibles…

Et André ?… Marie lui pardonne de tout son cœur, mais elle le met hors de sa vie comme il la mit, naguère, hors de la sienne… Qu’il guérisse, qu’il retrouve sa maîtresse, qu’il l’épouse ou qu’il choisisse une autre femme, Marie se désintéresse de lui… Elle ne réussit même pas à fixer, par la pensée, les traits vagues et flottants de son visage.