Page:Tinayre - La Maison du péché, 1941.djvu/140

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Augustin n’avait pas revu sa mère. Mlle Cariste, compromise dans le « scandale », lui avait fermé sa porte en disant : « Tu nous as trompés ; tu as fait de nous des complices de tes désordres. Je ne peux plus te recevoir. Tu reviendras quand tu seras réconcilié avec le bon Dieu… » Et tout le clan des dévotes, plaignant la sainte, maudissait le fils dénaturé qui « se perdait avec une mauvaise femme ».

Seul, le capitaine restait du parti d’Augustin. Seul, il ne jetait pas la pierre à la « mauvaise femme ». Et, plus que le mépris des gens « comme il faut », plus que la basse ironie du vulgaire, Augustin redoutait la tristesse suppliante, l’exquise mansuétude du vieillard. Tout brûlant de charité évangélique, le père Courdimanche ne comprenait rien aux dogmes de terreur qui opprimaient l’âme d’Augustin. Il avait grand-peine à admettre l’éternité des peines. – « L’enfer existe, disait-il, mais je crois bien qu’il n’y a personne dedans… » – Soucieux de préserver le pécheur du crime suprême qui est le désespoir, il lui montrait sans cesse le Christ souriant, aux bras ouverts, le maître des miséricordes qui accueille l’enfant prodigue et l’ouvrier de la dernière heure… Ces exhortations naïves troublaient Augustin jusqu’aux larmes. Elles réveillaient en lui le souvenir des joies perdues, le regret des sacrements interdits, et ce sentiment qui contenait tous les autres : la nostalgie de Dieu.

Le jeune homme essaya de s’en distraire. Il lut des livres prêtés par Fanny, et quelques-uns de ces ouvrages de philosophie et de