Page:Tinayre - La Rancon.djvu/130

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je lui en voulais de me retenir. Enfin, un monsieur est arrivé, heureusement, un artiste, je crois, assez beau garçon et que cette sournoise de Suzanne semble aimer beaucoup. Je les ai laissés en tête à tête et ils ont paru enchantés.

— Souhaitons-leur beaucoup de bonheur !

— Autant qu’à nous,

— Autant ? Ah ! ce n’est pas possible !

— Vous êtes donc bien heureux ? dit-elle.

— Regardez-moi !… Je suis accablé, anéanti de bonheur… Cette journée restera dans mes souvenirs comme la plus belle, la meilleure que j’aie passée avec vous… Ma chérie, que vous étiez docile et douce ! Que vous m’aimiez !… Ah ! ne soyez pas jalouse du passé ! Jamais je n’ai aimé, jamais je n’ai vécu… Tout commence !

Elle se laissa glisser sur un coussin, levant vers Étienne un visage ébloui d’amour…

— Répétez cela… Répétez que vous êtes heureux !… Vous me feriez aller au bout du monde… Vous êtes un enchanteur, vous êtes un magicien… Et si fort toujours, si maître de vous !

— Vous croyez ? Mais pensez donc à votre jeunesse ! Quelle tentation !… C’est vous qui êtes la séductrice, la petite Circé. Ah ! ne plus vous voir, renoncer à vous, à vos yeux, à