Page:Tinayre - La Rancon.djvu/179

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Elle secouait la tête et ne répondait pas. Ils s’enfonçaient dans le taillis, vers les abris touffus et frigides de l’Allée noire, étoilée de véroniques, embaumée du fort parfum des menthes. Des libellules rayaient l’ombre, devant eux, et le sol humide se couvrait de fraisiers, de lierres rampants, de bizarres plantes lancéolées. Les deux amants s’assirent dans un endroit sec où s’amoncelaient des feuilles mortes. Étienne prit la main de Jacqueline et la baisa.

— Comment me faire pardonner ? dit-il. C’est notre première querelle. Que de moments de bonheur perdus.

Il sentait la différence qui subsistait, malgré l’amour, entre cette petite âme mobile, toute d’instinct et de sentiment, et son âme d’homme, dont quarante années de dure vie avaient amorti l’élan naturel vers la joie. Et comprenant que Jacqueline, moins raisonneuse, était peut-être plus logique que lui, il reprit :

— J’avais tout oublié dans l’ivresse de ces deux semaines. Le retour de Paul, si proche, m’épouvante… et cette lettre de Jo, cette lettre que vous m’avez montrée, m’a serré le cœur.

— Vous avez des remords ?

Il murmura :