Page:Tinayre - La Rancon.djvu/180

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— Que n’êtes-vous à moi seul ? Pourquoi la fatalité nous condamne-t-elle au mystère, aux terreurs, aux mensonges ?

Elle répondit :

— Vous êtes dur pour moi.

— Comment ?

— Est-ce le moment de me rappeler ces choses ? Je ne suis pas un philosophe, moi. Je n’ai pas de théories. Je ne sais qu’aimer. Et vous me croyez mauvaise mère, vous me reprochez ma gaieté, ma jeunesse, mon bonheur.

Elle fondit en larmes. Désolé, il la prit dans ses bras :

— Ah ! que vous êtes bien femme ! Mais vous êtes aussi une grande enfant. Ne parlons plus de tout cela. Vous irez voir Jo demain, et je ne gâterai plus notre bonheur, je vous le promets. Allons, essuyez ces beaux yeux, ma Jacqueline.

Elle se laissa cajoler, mais les réflexions d’Étienne l’avaient touchée au vif du cœur.

Elle ne pouvait comprendre qu’il n’oubliât pas l’univers entier auprès d’elle, et sensible, susceptible, fière aussi, l’appréhension du mépris la rendait ombrageuse. Elle ne bouda point pendant la promenade à travers la forêt, le goûter à Chaville, le retour sous un beau ciel tragique, fauve