Page:Tinayre - La Rancon.djvu/84

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Trois heures et demie sonnaient. Jacqueline erra à travers la gare, ne pouvant tenir en place inquiète d’être surprise ou remarquée, si elle demeurait au même endroit. Elle s’assit un moment dans la salle des départs, tâchant de s’intéresser au va-et-vient des employés, au bariolage des affiches, aux petits drames des adieux échangés par des inconnus… Puis elle s’arracha à sa rêverie et se dirigea lentement vers les salles d’attente de l’arrivée. Le train de Nantes était signalé. Tout à coup, au milieu des cris et des rumeurs, les portes s’ouvrirent, le flot des voyageurs déferla. Appuyée au grillage, Jacqueline comprimait les battements de son cœur, redoutant et désirant la minute où Chartrain apparaîtrait. Enfin, entre une casquette de campagnard et une cornette de religieuse, Jacqueline aperçut la barbe blonde d’Étienne, son profil grave sous un feutre noir. Elle resta clouée sur place… Déjà il était sur le trottoir de la cour, sa valise à la main, appelant une voiture. Elle fit quelques pas et soudain :

— Vous !… s’écria-t-il… C’est vous !…

— Pauvre ami, cher ami !… dit-elle.

Elle lui tendit les mains et murmura :

— Je n’ai pas pu m’empêcher de venir… Je