Page:Tinayre - Les Lampes voilees.djvu/26

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rence, tendant les mains vers la bonne chaleur, interroge :

— Comment va mon petit Massier ?… Et Vanot ?… Et Jacob !… Et Pierquin ?…

Son beau regard lumineux effleure chaque front, comme une caresse.

Les quinze enfants couchés sous les couvertures grises, c’est le déchet de la race, en qui se vérifie la malédiction biblique, car ils expient, dans la souffrance, le péché qu’ils n’ont pas commis. Trois mauvaises fées les ont marqués, dès le berceau, trois Furies qu’agite une obscure démence et qui s’appellent : Tuberculose, Alcoolisme, Syphilis. Enfants conçus par mégarde entre deux hoquets, un soir de paie et de bombance, avortons qui ont sucé des seins arides et des biberons sales, filleuls du vice et de la misère, tous portent une marque mystérieuse, tous se ressemblent inexplicablement, comme si le mal, en corrompant leurs os et leurs tissus tendres, les remodelait sur un type unique et créait entre eux une parenté. Des faces asymétriques, au nez sans racines, aux