Page:Tinayre - Les Lampes voilees.djvu/59

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brillaient sous un double nuage de cheveux poudrés et de dentelles flottantes.

Comme la maîtresse du logis, le mobilier présentait le plus étrange contraste et révélait la gêne parmi les débris d’un luxe fané. On y voyait de beaux meubles anglais, en acajou sombre, des bergères, couverts de velours citron, des sièges en vannerie fine, mais le tapis était décoloré ; les stores de mousseline étaient reprisés délicatement. On sentait partout le souci de l’économie, le soin minutieux qui fait durer les moindres choses jusqu’à l’usure complète. En temps de guerre, dans un village séparé du monde, il était impossible de remplacer aucun objet brisé ou perdu, et ceux qu’on aurait pu trouver coûtaient fort cher. Or, comme il arrivait dans presque toutes les familles françaises, les revenus avaient baissé, et les dames de Préchateau connaissaient des jours difficiles. Elles supportaient l’épreuve avec dignité, et sans jamais se plaindre. Si la mère, dans l’intimité, manifestait parfois du mécontentement, la fille, qui devait calculer,