Page:Tinayre - Les Lampes voilees.djvu/94

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grève désolée où le soir descend ? Elle contemple ce ciel ardoisé, cette bande de lumière jaune qui se rétrécit à l’horizon, les vols de mouettes mêlés aux écumes flottantes. Face à la mer, le vent des grands espaces l’enveloppe. Tout à l’heure, elle reviendra seule et retrouvera la trace de ses pieds sur le sable ; elle se rappellera peut-être mes pas marqués auprès des siens ; elle cueillera, en souvenir de l’amitié défunte, l’immortelle des sables dont j’aimais tant l’âpre odeur, et les chardons argentés qu’un peu d’azur colore, fleur chaste et dure comme une vie sans amour. »


» J’ai connu les troubles les plus violents des passions ; jamais ce trouble… Il n’était pas dans ma chair et dans mon sang, mais au plus profond de mon être pensant et sensible. Il m’effrayait, parce qu’il était nouveau pour moi, obscur, intolérable comme l’obsession commençante de la folie. Plus sensuel, il ne m’eût pas donné cette sorte d’épouvante mystique. Une puissance s’était levée de la mer et pesait