Page:Tinayre - Madeleine au miroir.djvu/19

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de me poser en héroïne. Mes parents m’ont tendrement élevée ; j’ai fait un mariage raisonnable, un vrai mariage à la française, que tout le monde appela « un mariage d'inclination ». Mon mari que j’ai perdu il y a six ans, fut un compagnon brusque, autoritaire et affectueux, assez jaloux de ses droits et très convaincu de ses devoirs. Il me fit pleurer quelquefois, mais il employa son énergie et son intelligence pour les seuls intérêts de la famille. Loin de me traiter en maîtresse ou en servante de son bon plaisir, il m’initia à ses affaires, il m’associa à ses projets, il me mit en contact avec toutes les réalités que certaines pécores veulent ignorer — par élégance !… Je fus sans amour, une amie dévouée ; notre amitié conjugale me donna le courage de résister et de vaincre quand vint l’heure de la tentation inévitable — car je fus tentée, moi aussi. Si je ne l’avais jamais été pourrais-je me dire vertueuse et saurais-je excuser mes sœurs plus faibles que moi ?

Les femmes trop parfaites ne se connaissent {{{2}}} demi ; elles ne sont jamais sûres que leur vertu orgueilleuse ne soit pas tout simplement