Aller au contenu

Page:Tinayre - Une provinciale en 1830.pdf/19

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

C’est tout. Je n’ai pas d’autres notions sur cette très vieille dame. Il ne m’en reste pas d’autre image. Je me souviens, un peu plus tard, de son enterrement. Je le suivais, en donnant la main à mon plus jeune oncle, et cela me remplissait d’un orgueil extraordinaire.

J’avais sept ans.

Cette forme apparue dans la pénombre d’une chambre silencieuse, cette figure que si peu d’êtres encore vivants ont connue, je l’ai prise comme le modèle de la jeune provinciale qui est l’héroïne de ce petit livre. La mode est aux biographies « romancées ». J’ai romancé en partie seulement — l’histoire de ma bisaïeule, et de ma trisaïeule, Lucile de Narfon « si bonne et si terrible ». Ma mère avait noté tout ce qu’elle savait de sa famille périgourdine. Je me suis servi des documents qu’elle m’a donnés. Verthis existe, et la maison de la poste royale ; les Fargeas, les Fonard, ont existé. Je n’ai même pas changé le prénom de ce « casseur de cœurs », l’oncle Zerbin, qui nous a laissé pour seul héritage les mémoires de son tailleur.

Ainsi, pour peindre un type de jeune fille provinciale, sous la Restauration, j’ai mêlé le réel et l’imaginaire, mais j’ai donné la plus grande place au réel, et j’ai eu pour guide et pour inspiratrice, à chaque page de ce récit, la mère bien-aimée que je pleure.

Marcelle Tinayre.