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Page:Tissot - Principes du droit public, 1872.djvu/49

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Ces trois sciences, l’histoire du droit public, la philosophie de ce droit, la philosophie de l’histoire de ce même droit sont souvent confondues, au grand préjudice de la vérité, de la science et de ses progrès. L’historien n’est que trop porté généralement à ne voir que des faits et à tout voir dans les faits, et par conséquent à négliger ou à dédaigner les principes. Le philosophe, au contraire, tout entier à la recherche des principes, prend trop aisément son parti d’ignorer les faits ou n’en tient pas un compte suffisant. L’historien philosophe des institutions, des lois, comme Montesquieu, par exemple, croira donner le dernier mot de la philosophie de l’histoire des institutions, quand il aura dit d’où elles viennent sans plus s’inquiéter de l’accord ou du désaccord de cette origine avec la nature et la destinée de l’homme et des sociétés.

Cette manière partielle d’envisager la question a un autre défaut quand elle est exclusive : c’est qu’elle devient par le fait erronée. Alors l’historien tombe dans l’empirisme et nie faussement les principes qu’il méconnaît. Le simple juriste, qui ne connaît que la loi positive, en supposant même qu’il fût au courant de toutes les législations existantes, est très porté à voir dans les dispositions législatives mêmes, je ne sais quoi d’absolu, de primitif, d’oraculaire et d’inspiré, sans raison connue d’être, ou étant à soi-même toute sa raison suffisante. Et dès lors il ne sent nul besoin de connaître d’autres faits et d’autres principes que le fait même de l’existence des lois, et ces lois elles-mêmes comme principes qui n’en réclament pas d’autres propres à l’expliquer.