Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 1.djvu/53

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son rapport du 8 juillet 1851, sur la révision de la constitution de 1848, dans lequel se trouvent tout à la fois mises en lumière les causes qui rendaient cette révision si nécessaire, et les circonstances extraordinaires qui la rendaient si difficile. Dernier et solennel témoignage d’honnêteté et de sincérité politiques d’un homme qui, dans tout le cours de sa carrière, n’a jamais dit une parole qui ne fût l’expression de sa pensée, ni fait un acte qui ne fût en harmonie avec ses autres actes.

Ainsi se montrent à la fin comme dans tout le cours de sa vie, cet accord des actions avec les discours, cette parfaite unité de sentiments, d’idées et de vues, qui distingue l’existence de Tocqueville, et qui, à l’éclat si rare du talent et du génie, ajoute la splendeur encore plus rare du caractère[1]. Un illustre écrivain allemand a dit :

  1. C’est sans doute cette pensée qui a inspiré l’auteur d’un article publié par une revue anglaise, peu de temps après la mort de Tocqueville, et où je trouve les lignes suivantes :

    « Il y a une entière disproportion entre l’existence de Tocqueville et le vide occasionné par sa mort. Un homme d’une naissance distinguée mais non illustre ; d’une fortune indépendante mais médiocre ; célèbre comme voyageur, et qui n’a exploré que des pays connus ; auteur d’un seul grand ouvrage complet et d’un autre seulement commencé, remarquable comme orateur, mais sans grande influence sur le parti de l’opposition, avec laquelle il votait, et à laquelle il n’appartenait qu’à demi ; ministre pendant quelques mois d’une république qu’il n’avait ni fondée ni appelée de ses vœux ; cet homme disparaît au milieu de sa carrière ; et l’événement est considéré non-seulement comme un malheur national, mais comme une catastrophe qui touche aux plus chers intérêts de l’humanité tout entière.