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notre âge, n’est point une institution qui puisse durer. Il cessera par le fait de l’esclave ou par celui du maître. Dans les deux cas, il faut s’attendre à de grands malheurs.

Si on refuse la liberté aux nègres du Sud, ils finiront par la saisir violemment eux-mêmes ; si on la leur accorde, ils ne tarderont pas à en abuser.

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CHAPITRE III

QUELLES SONT LES CHANCES DE DURÉE DE L’UNION AMÉRICAINE ? QUELS DANGERS LA MENACENT ?

Ce qui fait la force prépondérante réside dans les États plutôt que dans l’Union. — La confédération ne durera qu’autant que tous les États qui la composent voudront en faire partie. — Causes qui doivent les porter à rester unis. — Utilité d’être unis pour résister aux étrangers et pour n’avoir pas d’étrangers en Amérique. — La Providence n’a pas élevé de barrières naturelles entre les différents États. — Il n’existe pas d’intérêts matériels qui les divisent. — Intérêt qu’a le Nord à la prospérité et à l’union du Sud et de l’Ouest ; le Sud à celles du Nord et de l’Ouest ; l’Ouest à celles des deux autres. — Intérêts immatériels qui unissent les Américains. – Uniformité des opinions. — Les dangers de la confédération naissent de la différence des caractères dans les hommes qui la composent et de leurs passions. — Caractères des hommes du Sud et du Nord. — La croissance rapide de l’Union est un de ses plus grands périls. — Marche de la population vers le Nord-Ouest. — Gravitation de la puissance de ce côté. — Passions que ces mouvements rapides de la fortune font naître. — L’Union subsistant, son gouvernement tend-il à prendre de la force ou à s’affaiblir ? Divers signes d’affaiblissement. — Internal improvements. — Terres désertes. — Indiens. — Affaire de la Banque. — Affaire du tarif. — Le général Jackson.

De l’existence de l’Union dépend en partie le maintien de ce qui existe dans chacun des États qui la composent. Il faut donc examiner d’abord quel est le sort probable de l’Union. Mais, avant tout, il est bon de se fixer sur un point : si la confédération actuelle venait à se briser, il me paraît incontestable que les États qui en font partie