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Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 9.djvu/267

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mal ou d’une manière incomplète. Sans être jamais rebelles, ils se montraient souvent indisciplinés.

Dans le principe, les magistrats salariés durent recourir contre eux à des punitions nombreuses et rigoureuses, qui devinrent de plus en plus douces et plus rares, à mesure que les esprits se familiarsaient avec le nouveau système du travail.

Dans la première année de l’apprentissage, c’est-à-dire du 1er août 1834 au 31 juillet 1835, les magistrats salariés ont infligé aux alTrancliis de la Barbade sept mille sept cent quatre-vingt-six punitions, dont mille sept cent quarante-deux cbàtiments corporels[1]. Les affranchis de la Barbade étaient au nombre de trente mille à peu près.

Cette répression paraîtra moins sévère si on la rapproche d’un fait cité par le gouverneur de la Guyane, dans une dépêche du 20 juin 1835, relative à ce qui se passait du temps de l’esclavage[2].

« A la propriété de V…, dit-il, sur trois cent quinze esclaves, cent quarante-huit ont été fouettés en six mois, et sur la propriété de P… sur cent vingt-neuf esclaves, soixante-quatorze ont été également fouettés dans le même espace de temps. Ainsi, deux cent vingt-deux nègres sur quatre cent quarante-quatre ont été punis corporellement en six mois, c’est-à-dire que personne n’a échappé au fouet durant l’année. » Le gouverneur ajoute avec laison : « Si les esclaves ont mérité ces terribles châtiments, il fallait qu’ils fussent de grands misérables, et s’ils ne les ont pas mérités, on doit reconnaître que le système sous lequel ces châtiments ont été administrés était bien cruel et bien oppressif. » Ce qu’il y a de particulier, c’est que ces mêmes esclaves, devenus des affranchis et traités avec douceur, se firent remarquer par leur bonne conduite[3].

Du reste, ainsi que je l’ai dit plus haut, on voit, dans la plupart des colonies, le nombre des châtiments, et surtout des châtiments corporels, diminuer rapidement à mesure que l’apprentissage dure. Les punitions corporelles qui[4], à la Guyane, s’étaient élevées, en 1835, à cinq cent trente-neuf, ne s’élevaient qu’à quatre-vingt-trois en 1837.

  1. Parliamentary papers, II, part. iii, p. 6.
  2. Id., p. 24.
  3. Id.
  4. Id., XXI part. v, p. 205.