Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 9.djvu/470

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fin la centralisation du gouverneur général ; mais-celle ci est, de sa nature, plus politique qu’administrative. Le gouverneur peut bien donner une impulsion générale à l’administration, mais il lui est difficile d’en suivre et d’en coordonner les procédés. Sa principale mission, c’est de dominer le pays, d’eu gouverner les habitants, de s’occuper de la paix, de la guerre, de pourvoir aux besoins de l’armée, à la distribution de la population européenne et indigène sur le sol. On peut donc affirmer qu’aujourd’hui, en Afrique, notre grand et tutélaire principe de l’unité administrative n’existe pas. Plus loin nous ferons ressortir les conséquences de cet état de choses. Nous ne faisons que le montrer en ce moment.

A côté des pouvoirs qui administrent, se trouve un grand conseil de gouvernement, appelé Conseil d’administration, devant lequel les affaires sont apportées et discutées. Si ce Conseil ne s’était léservé que la solution des questions administratives les plus graves, il aurait pu remettre une certaine unité et quelque harmonie dans l’administration : mais on l’a fait descendre dans les moindres détails ; sa compétence s’est successivement étendue sur un espace que son travail ne peut parcourir ; en voulant tout connaître, il arrête tout. Près de ce Conseil, qui regorge d’attributions inutiles, on en a placé un autre, celui du contentieux, qui n’a pour ainsi dire rien à faire. L’ordonnance qui le crée place, il est vrai, dans sa compétence, toutes les questions qui se traitent devant nos conseils de préfecture ; mais plusieurs de ces questions ne peuvent pas se présenter en Afrique. D’une autre part, les questions qui naissent de la position spéciale de l’Algérie, et seraient naturellement de la compétence des tribunaux administratifs, ont été jusqu’ici retenues par l’administration elle-même.

Il faudrait d’ailleurs, pour que les tribunaux administratifs pussent rendre de vrais services en Algérie, qu’il en existât un dans chaque province.

Nous venons de montrer le nombre, l’étendue, la ’ situation respective des pouvoirs qui résident à Alger. Retournons maintenant aux provinces, et voyons comment s’y préparent les affaires. L’indépendance dans laquelle y vivent les différents fonctionnaires administratifs les uns des autres y est encore beaucoup plus grande et beaucoup plus préjudiciable à la bonne administration qu’elle ne l’est à Alger.