Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol10.djvu/309

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arrivé le lendemain de la mort de son père, sa voix trembla. Elle se détourna et, ensuite, comme si elle craignait que Rostov ne prît ses paroles pour un moyen de l’attendrir, elle le regarda d’un air interrogateur et craintif. Rostov avait des larmes aux yeux. La princesse Marie le remarqua et regarda Rostov avec reconnaissance, de son regard rayonnant qui faisait oublier la laideur de son visage.

— Je ne peux vous exprimer, princesse, combien je suis heureux d’être venu ici, par hasard, et de pouvoir me mettre à votre entière disposition, dit Rostov en se levant. Partez, si cela vous plaît, je vous réponds sur l’honneur que pas un seul homme n’osera vous inquiéter, si seulement vous me permettez de vous accompagner. Et, en saluant avec respect, comme on salue des dames de sang royal, il se dirigea vers la porte. Par le respect de son ton, Rostov semblait vouloir montrer que tout en considérant comme un bonheur sa connaissance avec elle, il ne voulait pas profiter de son malheur pour se rapprocher d’elle.

La princesse Marie comprit cette nuance et l’apprécia.

— Je vous suis très, très reconnaissante, lui dit-elle en français, mais j’espère que tout cela n’est qu’un malentendu, et que personne n’est coupable.