Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol11.djvu/121

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Pierre, sentant les regards fixés sur lui, fit comme l’autruche qui cache sa tête dans un buisson pour ne pas être vue. Il baissa la tête, et, accélérant le pas, s’éloigna dans la rue.

De tout ce que Pierre devait faire ce matin, le classement des livres et des papiers de Joseph Alexiévitch lui semblait le plus nécessaire.

Il prit la première voiture qu’il rencontra et ordonna de le conduire à Patriarché-Proudi où se trouvait la maison de la veuve Bazdéiev.

Sans cesser de regarder les convois qui s’avancaient de tous côtés et quittaient Moscou, Pierre installait son gros corps dans la voiture de façon à ne pas glisser, et il éprouvait un sentiment joyeux semblable à celui d’un garçon qui s’est enfui de l’école. Il se mit à bavarder avec le cocher. Celui-ci lui racontait que ce jour-là on distribuait des armes au Kremlin, que le lendemain on chasserait tout le monde aux remparts des Trois-Montagnes et qu’il y aurait là une grande bataille. Arrivé à Patriarchié-Proudi, Pierre chercha la maison de Bazdéiev où il n’était pas allé depuis longtemps. Il s’approcha de la petite porte d’entrée. Guérassime, ce même petit vieux jaune, imberbe, que Pierre avait vu cinq ans auparavant à Torjok avec Joseph Alexiévitch, sortit à son appel.

— Y a-t-il quelqu’un à la maison ? demanda Pierre.

— Vu les circonstances actuelles, Votre Excel-