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Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol13.djvu/244

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celui de l’éclairage au gaz et des machines à coudre. Et l’homme qui envisage sans parti-pris tous les côtés de la vie de l’humanité trouvera toujours que le progrès d’un côté de la vie est contrebalancé par le retard d’un autre côté. Les hommes politiques les plus consciencieux qui ont crié au progrès de l’égalité et de la liberté ne se sont-ils pas convaincus et ne se convainquent-ils pas chaque jour que dans la Grèce et la Rome antique il y avait plus de liberté et d’égalité que dans l’Angleterre nouvelle avec les guerres chinoise et indienne, et dans la France nouvelle avec les deux Bonaparte et même dans la nouvelle Amérique avec la guerre acharnée pour le droit de l’esclavage ? Les hommes les plus consciencieux qui croient au progrès de l’art ne se sont-ils pas convaincus qu’en notre temps il n’y a pas de Phidias, de Raphaël, d’Homère ? Les progressistes économistes les plus hostiles ne se sont-ils pas convaincus qu’il est nécessaire de défendre aux travailleurs de produire des enfants afin qu’on puisse nourrir la population existante ? Ainsi, en répondant à deux questions que j’ai posées, je dis qu’on ne peut reconnaître que le progrès mène au bien-être :

1o Tant que tout le peuple qui subit les effets du progrès ne les trouvera pas bons et utiles ; or, actuellement, pour les neuf dixièmes de la population qu’on nomme classe ouvrière nous voyons toujours le contraire ;