Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol14.djvu/191

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Arrivé près de la forêt, il se mit à chercher, la queue tendue, les oreilles dressées, les narines frémissantes. J’armai mon fusil et marchai derrière lui, croyant qu’il flairait perdrix, faisan ou lièvre. Mais Milton ne s’enfoncait pas dans la forêt, il s’en allait par les champs. Je le suivis, regardant en avant. Tout à coup, j’aperçus ce qu’il cherchait. Devant lui cheminait un petite tortue, de la grosseur d’un bonnet. Sa tête nue, d’un gris foncé, emmanchée d’un long cou, s’effilait comme un pistil. Elle marchait en écartant largement ses pattes, nues comme sa tête, et une carapace lui couvrait le dos.

Quand la tortue aperçut le chien, elle rentra sa tête et ses pattes et s’enfonça dans l’herbe, de manière à ne présenter que sa carapace. Milton la saisit et se mit à mordre ; mais ses dents ne purent l’entamer ; car la carapace qui recouvre le dos de la tortue se continue sous le ventre, laissant seulement, par devant, par derrière et sur les côtés, des trous où passent la tête, les pattes et la queue.

J’arrachai la tortue à Milton et j’examinai les dessins de son dos, de sa carapace, et sa manière de s’y cacher. Quand, tenant une tortue à la main, on regarde par les trous de sa carapace, on voit, dans l’intérieur, comme dans une cave, quelque chose de noir et de vivant.

Je laissai tomber la tortue dans l’herbe et m’en allai, mais Milton ne voulut point l’abandonner. Il