Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol14.djvu/253

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— As-tu une nombreuse famille ?

— Ma famille se compose de deux fils et deux filles.

— Eh bien, ta famille n’est pas grande. Où mets-tu ton argent ?

— J’en fais trois parts : la première est pour les dettes ; je prête la seconde, je jette à l’eau la troisième.

Le tzar se demanda ce que le vieux pouvait bien vouloir dire avec ses parts.

Et le vieux lui dit :

— La part qui est pour les dettes, est celle avec laquelle je nourris mon père et ma mère ; celle que je prête, est pour nourrir mes fils ; celle que je jette à l’eau, est pour nourrir mes filles.

Et le tzar dit :

— Tu as de l’esprit, vieux, maintenant, reconduis-moi de la forêt dans le champ, car je ne puis trouver mon chemin.

Le paysan dit :

— Tu trouveras la route toi-même ; va tout droit, ensuite tourne à droite, puis à gauche, et encore à droite.

Le tzar répartit :

— Je ne comprends pas ton explication. Conduis-moi.

— Mais c’est que je n’ai pas le temps. Pour nous, paysans, une journée de travail vaut cher.

— Eh bien ! si cela coûte cher, je paierai.