Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol15.djvu/392

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muselière, la bête est très excitée. Il vaut mieux n’y pas aller, cela trouble le cheval.

— Non, j’irai, je veux voir.

— Allons, dit l’Anglais, toujours sans ouvrir la bouche, en fronçant les sourcils et agitant les coudes. Il passa devant de son allure gauche.

Ils entrèrent dans la petite cour devant le hangar. Le garçon de service, en jaquette propre, presque cossu, le balai à la main, vint au devant des visiteurs et les suivit. Dans l’écurie se trouvaient cinq chevaux, chacun dans sa stalle. Vronskï savait qu’on devait y amener ce même jour son principal concurrent, Gladiateur, un alezan appartenant à Makhotine, et il désirait voir Gladiateur, qu’il ne connaissait pas, encore plus que son propre cheval, mais il savait que d’après les sévères règlements des courses, non seulement il ne pouvait le voir, mais qu’il était même incorrect de s’intéresser à lui. Pendant qu’il traversait le couloir le garçon ouvrit la porte de la deuxième stalle à gauche et Vronskï aperçut un grand cheval roux aux pieds blancs. Il savait que c’était Gladiateur, mais avec le sentiment de l’homme qui se détourne d’une lettre ouverte ne lui appartenant pas, il se retourna et alla au box de Froufrou.

— Ici, c’est le cheval de Mach… Mach… Impossible de prononcer ce nom ! fit l’Anglais en lui désignant de son index à l’ongle noir, par-dessus l’épaule, la stalle de Gladiateur.