Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol17.djvu/230

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qui, ses longues jambes étendues sur une chaise, buvait un mélange d’eau de Seltz et de cognac. Il se fit servir la même chose.

— Tu dis Mogoutchi, le cheval de Lankovski ? C’est une belle bête que je te conseille d’acheter, commença Iachvine, jetant un regard sur le visage sombre de son camarade. La croupe est un peu fuyante, mais quelles jambes et quelle tête ; on ne peut désirer mieux.

— Aussi je pense l’acheter, répondit Vronskï.

Cette conversation sur les chevaux l’intéressait, mais la pensée d’Anna ne le quittait pas ; involontairement, il écoutait ce qui se passait dans le corridor et regardait la pendule de la cheminée.

— Anna Arkadiévna fait dire qu’elle est partie pour le théâtre, annonça le domestique.

Iachvine versa encore un petit verre de cognac dans l’eau gazeuse, l’avala et se leva en boutonnant son uniforme.

— Eh bien ! Partons-nous ? dit-il souriant à moitié sous ses longues mgustaches, montrant par ce sourire qu’il comprenait la cause de la contrariété de Vronskï sans y attacher une grande importance.

— Je n’irai pas, répondit Vronskï sombrement.

— Moi, je dois y aller, j’ai promis. Au revoir ! Si tu viens, tu pourras prendre le fauteuil de Krasinski, à l’orchestre, dit-il en sortant.

— Non, j’ai à travailler.

« On a des ennuis avec sa femme, mais avec une