Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol2.djvu/148

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— Je ne sais pas, peut-être demain, peut-être resterons-nous encore longtemps — répondis-je, je ne sais trop pourquoi, puisque nous devions absolument partir le lendemain.

— Je voudrais que vous restiez, pour vous et pour Dmitri — dit la princesse en regardant quelque part, dans le lointain. — À votre âge, l’amitié est une belle chose.

Je sentis que tous me regardaient et attendaient ce que j’allais dire, malgré que Varenka feignît d’examiner l’ouvrage de sa tante ; je sentis qu’on me faisait subir quelque chose comme un examen, et qu’il fallait se montrer sous le meilleur jour possible.

— Oui — dis-je ; — l’amitié de Dmitri m’est utile, mais moi je ne puis lui être d’aucune utilité, il vaut mille fois mieux que moi. (Dmitri ne pouvait entendre ces paroles, sans cela j’aurais eu peur qu’il n’y sentît un manque de franchise.)

La princesse rit de nouveau, de ce rire forcé qui lui était naturel.

— Eh bien ! Et à l’en croire — reprit-elle, — c’est vous qui êtes un petit monstre de perfection.

« Monstre de perfection, c’est admirable, c’est à prendre en considération ! — pensai-je.

— Mais cependant, sans parler de vous, il est maître en cette matière — continua-t-elle en baissant la voix, (ce qui m’était surtout agréable) ; et en montrant des yeux Lubov Sergueievna : — Il a