Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol24.djvu/168

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de l’homme. On peut, selon l’expression de Pascal, ne pas penser à cela, et porter devant soi un écran qui nous cache l’abîme de la mort où nous allons ; mais il suffit de réfléchir à ce qu’est cette vie isolée, personnelle, de l’homme, pour se convaincre que cette vie, en tant qu’elle est personnelle, n’a pas le moindre sens pour chacun de nous séparément, mais encore quelle est une cruelle raillerie pour le cœur et la raison et pour tout ce qui est bon en l’homme. Ainsi, pour comprendre la doctrine de Christ, il faut, avant tout, rentrer en soi-même, réfléchir, il faut qu’il se fasse en nous cette μετανοῖα, dont parle le précurseur de Christ — Jean-Baptiste, quand il s’adresse à des hommes au jugement brouillé, comme est le nôtre. Il disait : « Avant tout, repentez-vous, c’est-à-dire ressaisissez-vous, sans quoi vous périrez tous. » Il disait : « Déjà la cognée est mise au pied de l’arbre pour l’abattre. La mort et la perdition sont là devant nous. Ne l’oubliez pas ; ressaisissez-vous. » Et Christ commence également son enseignement en disant : « Si vous ne vous amendez, vous périrez tous » (Luc, xiii, 1-5.) On vient raconter à Christ la mort des Galiléens, massacrés par Pilate. Et il dit : « Pensez-vous que ces Galiléens fussent plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, parce qu’ils ont souffert ces choses ? Non, vous dis-je ; mais si vous ne vous amendez, vous périrez tous aussi bien qu’eux. Ou pensez-vous que ces