Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol3.djvu/268

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Puis Olénine but avec Erochka, ensuite avec un autre Cosaque ; après, de nouveau, avec Erochka. Et plus il buvait plus son âme devenait triste. Les vieux devenaient tapageurs. Les jeunes filles, installées sur le poêle, chuchotaient en les regardant ; ils ne firent que boire jusqu’au soir. Olénine ne disait mot et buvait plus que les autres. Les Cosaques riaient de n’importe quoi ; la vieille les chassa et ne donna plus de vin. Les jeunes filles se moquaient de l’oncle Erochka et il était déjà dix heures quand tous sortirent sur le perron. Les vieux s’invitèrent eux-mêmes à passer la nuit chez Olénine. Oustenka courut chez elle. Erochka conduisit le Cosaque chez Vanucha. La vieille partit mettre en ordre la cuisine. Marianka restait seule dans la cabane. Olénine se sentait frais et dispos comme s’il venait de s’éveiller. Il observa tout, et laissant les vieux aller en avant, il retourna dans la cabane. Marianka se disposait à aller au lit. Il s’approcha d’elle, voulut lui dire quelque chose, mais sa voix s’arrêta. Elle s’assit sur le lit, replia ses jambes sous elle, se recula, dans le coin, et en silence, d’un regard effrayé, sauvage, le regardait. Visiblement, elle avait peur de lui. Olénine le sentit. Il se sentit gêné et honteux de lui-même et en même temps il éprouvait un sentiment de fierté d’exciter en elle au moins ce sentiment.

— Marianka — dit-il — n’auras-tu jamais pitié