Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol4.djvu/393

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comment, plusieurs fois, au moindre bruit, il s’approchait et s’éloignait de la fenêtre, comment il lui semblait indiscutable qu’elle l’attendait, dépitée de sa lenteur, — parfois il lui semblait impossible qu’elle se fût décidée si facilement à ce rendez-vous, — comment enfin, supposant qu’en provinciale gênée elle feignait seulement de dormir, il s’était approché résolument et distinguait nettement sa pose. Mais ici, tout à coup, il ne sait pourquoi, il avait fui en toute hâte puis, honteux de sa poltronnerie, s’approchait d’elle hardiment et lui touchait la main.

Le gardien grommela de nouveau, la porte cochère grinça, et il sortit du jardin. La fenêtre de la chambre de la demoiselle se refermait et l’auvent intérieur s’abaissait. Le comte en avait un grand dépit. Il aurait donné cher pour recommencer, mais cette fois il n’agirait pas si sottement… « Une demoiselle merveilleuse ! Comme elle est fraîche ! C’est un charme ! Et raté… Animal stupide que je suis ! » En outre, il n’avait plus envie de dormir : du pas décidé d’un homme désappointé, il marcha au hasard dans les allées de tilleuls.

Là, cette nuit lui apportait les dons pacifiants d’une tristesse calme et du besoin d’amour. Le sentier de terre glaise avec, par-ci par là, une petite herbe ou une branche sèche, s’éclairait à travers le feuillage épais des tilleuls, de cercles formés